Décrypter une image alchimique est un exercice indispensable, ça nous pousse à augmenter notre culture. Dans les gravures il y a souvent des phrases en latin, en grec ou en hébreux dont il faut aller chercher la traduction, ça participe à notre compréhension de ces langues. On trouve également des références historiques ou religieuses qu’il faut remettre dans leur contexte, bref, c’est un moyen ludique d’augmenter notre culture et notre compréhension de l’alchimie.

Dans cet article, on va s’intéresser à une gravure réalisée par Henri Khunrath qui se trouve dans le livre : l’Amphithéâtre de l’éternelle sapience.

Henri Khunrath est né à Leipzig en 1560 et c’est un Kabbaliste Chrétien de très grande renommée. Durant l’hiver 1570, il s’inscrit peut-être à l’Université de Leipzig sous le nom de Henricus Conrad Lips. Les incertitudes concernant sa biographie proviennent de son usage supposé de multiples noms.

Disciple de Paracelse, il pratique la médecine à Dresde, Magdebourg et Hambourg, et il a peut-être occupé un poste de professeur à Leipzig. En 1588, il est diplômé de la faculté de médecine de Bâle où étudiera quelques années plus tard un certain Michael Maier, l’auteur d’un ouvrage très célèbre en alchimie, l’atalante fugitive. En 1589, il y rencontre le mathématicien et astrologue anglais During John Dee.

Son ouvrage le plus connu, l’ Amphitheatrum Sapientiae Aeternae (Amphithéâtre de la sagesse éternelle), est publié à Hambourg en 1595. C’est un classique de la littérature alchimique, qui mêle magie, philosophie naturelle et christianisme. Cet ouvrage eut une influence dans les milieux luthériens. L’historien John Warwick Montgomery note ainsi que le théologien luthérien Johann Arndt (1555 – 1621), écrivit un commentaire de l’Amphitheatrum. L’historienne Frances Yates le considère comme le lien entre la philosophie de John Dee et le Rosicrucianisme.

Dans ce fameux livre, Khunrath commente 365 versets et propose 8 gravures dans sa première édition, c’est la dernière gravure qui va nous intéresser dans cet article.

La représentation du grand Œuvre Alchimique

L’image qui nous intéresse ici a été publiée dans l’édition de 1609 et elle est connue sous le nom de « l’oratoire ».

Si on décrypte cette image alchimique, la première chose que l’on peut observer, c’est qu’il y a trois parties principales qui découpent cette image. À gauche il y a un homme à genou qui est en train de prier, au milieu une table sur laquelle on peut voir des instruments de musique et des outils de mesure et à droite, un laboratoire d’alchimiste centré sur le four.

Le principe divin (gauche)

À gauche, un homme est à genou devant un tabernacle, il est en train d’invoquer une divinité. Sur la table devant lui, on peut apercevoir des livres qui contiennent probablement des textes sacrés.

Juste au-dessus, il y a une lampe qui éclaire une pancarte sur laquelle il est écrit Ne Loquaris de Deo absque lumine, ce qui signifie, « ne parle pas de dieu sans la lumière« . Juste au-dessus de l’ouverture du tabernacle il y a un mot écrit en hébreux, חכמה (Hokmah), qui signifie sagesse. Au-dessus de ce mot on peut lire une phrase qui mélange latin et hébreux, Felix cui יהוה (IHVH) consiliis, ce qui veut dire « heureux celui qui a les conseils de IHVH« .
Entre l’homme et la table centrale, il y a une sorte de petite console avec un encensoir qui dégage de la fumée dans laquelle il est écrit : Ascendat ut fumus ORATIO, sacrificium DEO acceptabile, que l’on peut traduire par « que la prière s’élève comme la fumée, en un sacrifice agréable à Dieu« .

Le principe psychique (centre)

Au centre de l’image, il y a une grande table sur laquelle on trouve des instruments de musique à l’avant et des appareils de mesure à l’arrière. Sur la tranche, il y a une longue phrase qui donne un indice sur la présence de cette table : Musica sancta tristitiam spirituum malignorum fugat : quia spiritus IHVH hilariter psallit in corde gaudio pio perfuso, ce qui veut dire : « la musique sacrée dissipe la tristesse des esprits malins, car l’esprit de IHVH chante joyeusement dans un cœur empli de sainte joie ». Cette table nous indique l’importance de la musique, mais aussi des mathématiques, deux disciplines intimement liées.
Sur la droite de la table, il y a un appareil de distillation qui est symboliquement important de la quête du grand œuvre alchimique et sur le dessus, il est marqué : Festina lente, qui veut dire « hâte-toi lentement« .

Le principe matériel (droite)

Tout à droite on a la dernière partie du grand œuvre, le laboratoire. Sur chaque pilier qui soutient la structure, il y a un mot gravé, sur le premier pilier, c’est Experientia, « expérience » et sur le deuxième Ratio, « la raison« . Sur la tablette de la cheminée, on peut voir toutes les matières qui serviront aux opérations, l’azoth, le mercure, la terre etc.

Au bout de la table, entre le four de l’alchimiste et le tabernacle, il y a un fauteuil et tout au dessus, une poutre qui le surplombe sur laquelle on peut lire l’inscription : Sine afflatu divino, nemo unquam vir magnus, qui veut dire : « sans l’inspiration divine, aucun homme n’est grand« .

Pour finir l’observation, comme ce dessin est une expression du grand œuvre alchimique, toutes les lignes de fuite pointent dans la même direction et nous montre une porte ouverte sur un jardin, il s’agit de la roseraie des philosophes.

Comprendre le grand Œuvre Alchimique

Comme souvent quand on décrypte une image alchimique, on tombe sur un nombre considérable de symboles qui nous guident sur la voie. Le but de ce type de gravure est évidemment de faire progresser chacun d’entre nous sur son propre chemin, il faut donc regarder l’image en détail, chercher le sens de tous les mots et essayer d’en faire une interprétation globale. Dans la vidéo ci-dessous, je vous donne quelques clefs pour comprendre cette image, mais je laisse une partie de son sens, sous silence. Le but est que vous puissiez finir l’interprétation vous-mêmes.

Vous pouvez retrouver l’analyse de la gravure plus en détail sur en vidéo. Bon visionnage 🍿

À propos de l'auteur

Tony

Créateur et animateur de la chaine youtube mysteria, je navigue entre ésotérisme, occultisme, archéologie alternative, spiritualité etc. J'essaie de traiter tous ces sujets passionnants avec une juste dose d'esprit critique, pour explorer les mondes immatériels tout en gardant les pieds sur terre.

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