Tenet, un film qui retourne le temps
Sorti en 2020, Tenet de Christopher Nolan a dérouté de nombreux spectateurs par sa narration complexe et son concept de temporalité inversée. Mais au-delà du scénario, un détail intrigue : plusieurs noms et lieux du film renvoient directement au mystérieux carré magique de Sator.
Sator, Arepo, Tenet, Opera, Rotas… Ces cinq mots apparaissent dans le long-métrage sous des formes diverses : le méchant russe Andrei Sator, le faussaire Arepo, la première scène à l’Opéra, l’entreprise Rotas… et bien sûr le titre lui-même, Tenet.
Qu’est-ce qu’un carré magique ?
À l’origine, un carré magique est une grille mathématique où la somme des chiffres est identique, que l’on additionne horizontalement, verticalement ou en diagonale. Connu dès le VIIe siècle en Chine, il s’est diffusé en Inde, dans le monde arabe puis en Europe, où il a acquis des propriétés mystiques.
Avec le temps, les chiffres ont été remplacés par des mots. Et le plus célèbre de ces carrés n’est autre que celui de Sator.
Le carré de Sator : un mystère vieux de 2000 ans
Le carré de Sator est une grille de 5 × 5 lettres formant cinq mots latins :
SATOR – AREPO – TENET – OPERA – ROTAS
Il est exceptionnel car il peut se lire dans tous les sens, horizontalement, verticalement et même en boustrophédon (en changeant de direction à chaque ligne).
La traduction littérale serait : « Arepo le semeur guide la roue avec soin. » Mais ce sens reste obscur et des débats passionnés perdurent depuis des siècles.
Origine chrétienne ?
Jusqu’aux années 1930, beaucoup pensaient que le carré était un symbole chrétien crypté. En réarrangeant ses lettres, on peut en effet former deux fois la prière Pater Noster (Notre Père), avec les lettres restantes A et O représentant l’Alpha et l’Oméga.
Découvertes archéologiques
En 1936, deux exemplaires furent découverts à Pompéi, datés entre 50 et 79 ap. J.-C., bien avant l’essor du christianisme. Ces trouvailles remettaient en cause l’hypothèse chrétienne et ouvraient d’autres pistes : origine romaine païenne, juive, étrusque, voire simple jeu de lettres.
Un objet magique
Au Moyen Âge, le carré de Sator fut utilisé comme talisman : gravé sur du pain pour faciliter un accouchement, sur des amulettes pour guérir la fièvre, ou même inscrit sur des disques de bois pour lutter contre les incendies.
Aujourd’hui encore, son sens profond reste inconnu. Était-ce une prière, une énigme religieuse, un jeu d’esprit ? Le mystère demeure.
Le carré de Sator dans Tenet
Christopher Nolan reprend ce symbole énigmatique pour tisser la structure de son film. Chaque mot du carré apparaît dans l’intrigue :
- Sator : le nom du méchant russe.
- Arepo : le peintre faussaire.
- Tenet : le titre et le mot-code du protagoniste.
- Opera : lieu de la première scène.
- Rotas : entreprise de stockage dans l’aéroport.
Mais le lien ne s’arrête pas là. Comme le carré, Tenet joue avec les symétries et les inversions. Le temps s’écoule dans les deux sens, créant une narration palindromique. Même la bataille finale repose sur ce principe : deux équipes opèrent simultanément, l’une avançant dans le temps, l’autre en marche arrière, dans une mission de « 10 minutes », clin d’œil au mot TEN – et à son inversion, NET.
Conclusion : Nolan et le mystère des symboles
En intégrant le carré magique de Sator dans Tenet, Christopher Nolan ne fait pas qu’un clin d’œil érudit. Il inscrit son film dans une tradition millénaire de symboles mystérieux, de lectures multiples et de sens cachés.
Comme le carré, Tenet peut être lu dans plusieurs sens. C’est un film-casse-tête, mais aussi une œuvre qui invite à réfléchir sur le temps, l’inversion et le rôle des symboles dans notre culture.
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