La pyramide d’Ameni Kemaou à Dahshour : vestiges d’un roi oublié de la XIIIe dynastie
Parmi les nombreux monuments égyptiens qui jalonnent le site de Dahshour, la pyramide d’Ameni Kemaou intrigue par son état de ruine avancé et par les mystères qui entourent son propriétaire. Découverte en 1957 par l’expédition américaine dirigée par Charles A. Muses, elle témoigne des pratiques funéraires du début de la XIIIe dynastie (vers 1783 – 1625 av. J.-C.), une période de transition marquée par l’instabilité politique et la multiplication des souverains éphémères.
Découverte et identification
C’est à l’intérieur de la sous-structure, fortement endommagée, qu’un coffre à vases canopes portant le nom d’Ameni Kemaou fut mis au jour. Ce roi, qui n’a régné qu’environ une année (1773 – 1772 av. J.-C.), reste largement méconnu. Toutefois, la présence de ce coffre, accompagnée de quelques ossements retrouvés dans la chambre funéraire, confirme que la pyramide fut bien utilisée comme tombe royale.

Une pyramide aujourd’hui presque disparue
De la superstructure, il ne subsiste quasiment rien : à peine une élévation de terrain qui laisse deviner son emplacement originel. La pyramide avait été construite sur un monticule rocheux, à l’aide de briques crues recouvertes d’un parement de calcaire.
Sa base mesurait environ 52 mètres, mais sa pente et sa hauteur exacte demeurent inconnues. Les spécialistes estiment toutefois que l’édifice devait atteindre environ 35 mètres de haut. Ce qui reste visible aujourd’hui correspond surtout aux infrastructures, typiques des pyramides de la fin de la XIIe dynastie (1991 – 1783 av. J.-C.).
Organisation interne et chambre funéraire
L’entrée, légèrement décentrée, se situait sur la face Est de la pyramide. De là , un couloir de dix mètres menait à une première herse destinée à bloquer l’accès. Un second passage, renforcé par une autre herse, débouchait sur un escalier descendant vers une petite salle intermédiaire.
Un nouvel escalier, creusé encore plus profondément vers l’Ouest, donnait sur la chambre funéraire, aménagée au Sud de l’axe central. Ce caveau, conçu dans un monolithe de quartzite, abritait le sarcophage et le coffre à canopes du roi. Une dalle transversale en granit scellait l’accès, garantissant la protection du défunt contre les pillards.

Usurpation possible du monument
Certains égyptologues avancent l’hypothèse qu’Ameni Kemaou, dont le règne fut très bref, aurait usurpé un monument funéraire déjà entamé par l’un de ses prédécesseurs. Ce type de réutilisation n’était pas rare à une époque où les règnes se succédaient rapidement, et où l’urgence d’assurer une sépulture royale primait sur la construction de nouveaux complexes monumentaux.
Un complexe incomplet
Contrairement aux pyramides royales classiques, la pyramide d’Ameni Kemaou semble avoir été dépourvue de mur d’enceinte et aucune tombe secondaire associée n’a été retrouvée à ce jour. Ces absences renforcent l’idée d’un monument inachevé ou repris à la hâte pour accueillir la dépouille d’un roi dont le souvenir reste énigmatique.
Conclusion
La pyramide d’Ameni Kemaou illustre parfaitement la fragilité de la XIIIe dynastie égyptienne : des règnes éphémères, des monuments inachevés et une mémoire partiellement effacée par le temps. Bien que réduite à l’état de ruine, elle demeure un précieux témoignage de l’évolution des complexes funéraires à la charnière du Moyen Empire et de la Deuxième Période intermédiaire.